Ces initiatives qui ont redonné vie à la viticulture bretonne

04/03/2025

Un passé viticole oublié : la Bretagne au temps des vignes

Avant de parler de renaissance, il est essentiel de comprendre que la Bretagne a eu, dans un passé lointain, une véritable activité viticole, bien que méconnue. Au Moyen Âge, la vigne se développait dans quelques zones abritées du climat océanique, notamment près de Nantes (qui appartenait historiquement à la Bretagne) et même jusqu'en Ille-et-Vilaine. Ce sont surtout les monastères qui cultivaient la vigne pour produire des vins de messe et pour l’usage domestique.

La fin de cette viticulture bretonne coïncide malheureusement avec la concurrence des vins du sud et les changements climatiques (un refroidissement global au XVIIᵉ siècle). La Bretagne abandonne alors en grande partie les vignes pour se tourner vers d’autres atouts agricoles. Et pendant plusieurs siècles, la vigne disparaît du paysage breton… jusqu’à ce que quelques passionnés décident de la réintroduire.

Un renouveau porté par des passionnés et des visionnaires

1. Les premiers plants de vignes expérimentaux

Le renouveau de la viticulture bretonne débute dans les années 1990 et 2000, grâce à des passionnés qui croyaient dur comme fer au potentiel des terres bretonnes. En tête de proue, on trouve des initiatives telles que celles de la famille Landais, près de Sulniac dans le Morbihan. Le domaine du Menez-Brug a été l’un des premiers à replanter des vignes dans la région. Cette famille mise audacieusement sur des cépages adaptés au climat local, comme le regent et le cabernet noir.

Ces premières plantations sont accompagnées de nombreuses expérimentations pour déterminer quels cépages résistent le mieux à un climat océanique marqué : humide, venteux, mais avec des étés de plus en plus secs. Les cépages interspécifiques (issus de croisements pour une meilleure résistance aux maladies) deviennent l’une des clés de la renaissance viticole bretonne.

2. L’appui des associations et collectifs locaux

Pour structurer ce renouveau, des associations comme Vignes de Bretagne ou Les Vignerons d’Armorique ont vu le jour. Elles regroupent des amateurs et professionnels partageant l’idée que la Bretagne peut redevenir une terre de vin, cette fois dans une logique artisanale et bio. À travers des rencontres, séminaires et une mutualisation des retours d’expérience, ces collectifs jouent un rôle crucial dans l’émergence d’une viticulture bretonne cohérente et durable.

3. Le rôle des institutions dans le soutien au bio

Le développement viticole breton aurait bien du mal à exister sans un soutien local. Très tôt, des aides européennes et régionales pour la valorisation de l’agriculture biologique ont permis à ces vignerons pionniers de tenir bon et d’expérimenter. La Bretagne s’inscrit ainsi dans une démarche d’innovation agro-écologique, visant à créer des produits liés à leur terroir tout en respectant l’environnement.

Les spécificités du territoire breton pour la viticulture

Contrairement à des régions comme la Bourgogne ou le Bordelais, la Bretagne offre des conditions très particulières à la vigne, parfois perçues comme des défis. Mais c’est justement cette singularité qui attire aujourd’hui l’attention sur les vins bretons.

  • Climat océanique : douceur des températures, précipitations régulières et vents parfois puissants. Ce climat impose à la vigne de développer des défenses naturelles, ce qui favorise une agriculture faible en intrants chimiques.
  • Sols variés : schistes, granites et sols limono-argileux, offrant un terrain de jeu inédit pour les vignerons. Ces sols peu profonds permettent de produire des vins au profil souvent vif, iodé et minéral.
  • Influence de la mer : les embruns marins apportent une identité unique aux raisins et donc aux vins, qui se démarquent résolument des productions plus traditionnelles.

Des exemples concrets de vignobles bretons en plein essor

Depuis ces premières initiatives, plusieurs domaines ont émergé en Bretagne. Certains ont su marquer les esprits, tant par la qualité de leurs productions que par leur implantation dans des zones inattendues.

Le domaine du Sillon : un pari ambitieux

Situé près de Redon, le domaine du Sillon est un parfait exemple de résilience. En réintroduisant des vignes sur un territoire où seul le cidre régnait, ces vignerons mettent en avant des vins frais et aromatiques, souvent élaborés à partir de cépages comme le cabernet blanc ou le pinot gris. Leur gamme comporte des blancs secs et des pétillants naturels qui séduisent jusque dans les bistrots parisiens.

Le renouveau de Belle-Île-en-Mer

Plus original encore : Belle-Île-en-Mer, connue pour ses paysages enchanteurs, abrite désormais des vignes sur ses falaises escarpées. Lancé par une poignée d’agriculteurs-aventuriers, ce projet conjugue terroir d’exception et respect de la biodiversité insulaire. Ces vins, encore en petite production, offrent des arômes salins et floraux qui incarnent parfaitement la Bretagne.

En route vers les vins bretons de demain

Si la viticulture bretonne en est encore à ses balbutiements, elle a déjà toute une histoire à raconter. Grâce aux efforts combinés d’agriculteurs passionnés, de collectifs engagés et d’un terroir atypique, les vins bretons suscitent un intérêt croissant, bien au-delà des frontières régionales. Et ce n’est que le début. Avec le changement climatique et l’évolution des pratiques œnologiques, qui sait quel rôle la région jouera dans le futur marché du vin ?

Une chose est certaine : le vent souffle dans les voiles de la viticulture bretonne, et il amène avec lui une promesse de découvertes gustatives hors du commun. Alors, à quand votre première dégustation d’un vin né entre terre bretonne et mer d’Armorique ? Santé !

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